
RIMMEL (Eugène) Comment un parfumeur a-t-il transformé le regard des femmes ?

Chaque matin le rituel est le même. Entre la tasse de thé, la tartine de beurre et le choix de la tenue, il y a pour beaucoup de femmes une étape incontournable : le maquillage.
Et si une femme met aujourd’hui en moyenne 23 minutes à se maquiller, cela n’a pas toujours été le cas. Il fut un temps où les trousses à maquillage n’existaient pas. Les femmes devaient fabriquer elles-mêmes leurs cosmétiques ! Jusqu’au 19e siècle, les plus coquettes se sublimaient les yeux avec une poudre noire constituée de sureau, de cendre, de suie et de jus de baies. Une fabrication artisanale dont la composition laisse à désirer… mais il y avait bien pire ! Dans l’Egypte antique le maquillage pour les yeux était une mixture faite de miel, de poudre d’amandes calcinées, d’antimoine (un produit au beaux reflets bleutés mais hautement toxique) et de fiente de crocodile ! C’est sûr que comme parure, on a vu plus glamour. Si seulement les femmes d’alors avaient pu se mettre un simple coup de rimmel sur les cils ! Il a fallu pour cela attendre l’invention de ce produit magique par… Eugène Rimmel !
C’est en 1834 qu’Eugène quitte sa France natale pour suivre son père à Londres. Il l’aide à tenir une boutique de parfums auxquels les deux hommes donnent leur nom : Rimmel London, une marque existant encore aujourd’hui. Véritable chimiste dans l’âme, Eugène reçoit de nombreux parfums et produits cosmétiques avant d’ouvrir en 1844 sa propre boutique, la « Chambre de Rimmel ». La marque Rimmel devient rapidement célèbre, en particulier pour ses parfums : on raconte même que la reine Victoria s’approvisionne chez lui !
Le XIXe siècle est incontestablement le premier siècle de la consommation de masse. Les grands magasins se développent et le marché des cosmétiques bat son plein. Les femmes peuvent désormais de procurer parfums, poudres, crèmes… mais toujours pas de maquillage pour les yeux ! Une anomalie dont l’inventif et avant-gardiste Eugène Rimmel va s’emparer en concevant un produit pour les yeux, non toxique et accessible à toutes, dès 1880. Ce n’est pas encore le mascara que nous connaissons, constitué d’un tube et d’une brosse, mais un bloc noir sur lequel il faut frotter un pinceau pour ensuite se colorer et allonger les cils. Le produit est composé d’un nouvel ingrédient à base de pétrole, la vaseline, formant ainsi une texture plus malléable.
Le succès est au rendez-vous et dépasse toutes les espérances, mais Eugène n’est plus là pour le voir. Ce sont ses fils qui, après avoir repris l’entreprise à la fin des années 1880, commercialisent au Royaume-Uni cette invention sous le nom de « Rimmel ». Cette dernière se vend comme des petits pains, traverse la Manche puis l’Atlantique et transforme le monde des cosmétiques. Elle devient tellement populaire que la marque désigne couramment tout type de mascara. Les cils des femmes ainsi ornés, une seule chose reste à espérer : que l’actuelle mode des cosmétiques « faits maison » ne réintroduise pas de fiente de crocodile dans les préparations !
