
COLETTE (Sidoine Gabrielle) Pourquoi cette auteure a-t-elle popularisé le col rond ?
Objet de bien des passions, pouvant être tout à la fois fier, vulnérable et érotique, le cou est assurément une partie du corps sur laquelle on pourrait écrire des livres entiers. La mode s’est chargée de lui rendre hommage puisqu’elle a trouvé au cours des époques mille et une façons de l’habiller : col roulé, col lavallière, col en V, décolleté… Bien plus qu’un détail, le col peut dévoiler la personnalité de celui le porte. C’est notamment le cas des cols Claudine, posés au ras du cou, célèbres pour leur forme arrondie et aplatie, souvent associés aux petits enfants sages.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, Claudine n’est pas une couturière ou une femme au style novateur, mais un personnage créé par la célèbre romancière, Colette. Gabrielle Colette étant particulièrement douée pour l’écriture, son premier mari Henry Gauthier-Villars, surnommé « Willy », détourne cette qualité à son profit. Gabrielle devient alors prête plume pour son époux et écrit, à la demande, un roman s’inspirant de ses souvenirs d’école. Ainsi, en 1900, paraît Claudine à l’école.

L’histoire relate les aventures de Claudine, jeune adolescente de 15 ans, sous la forme d’un journal intime, ses premières amours, sa relation avec son père et ses amies, mais aussi sa vie à l’école… Le succès est tel que Colette doit en écrire la suite ! Bientôt Claudine devient l’héroïne d’une série de romans : Claudine à Paris, Claudine s’en va… l’ancêtre de la célèbre Martine en quelque sorte ! La particularité de la jeune fille ? Elle porte une blouse avec un col arrondi, tenue que l’on retrouve sur la couverture du livre. C’est d’ailleurs Colette elle-même qui sert de modèle au dessin, habillée comme son héroïne. Si ce col existait bien avant la création du personnage de Claudine, le succès des romans lie à tout jamais la jeune fille au col de sa robe.
Les pays anglo-saxons ont, quant à eux, un autre terme pour désigner cette encolure, également inspiré d’un personnage de fiction, puisque ce type de col est appelé « Peter Pan » ! La raison : à la même époque que les Claudine, Peter Pan est adapté à Broadway et son interprète, Maude Adams, arbore le fameux col. La pièce de théâtre connaissant un franc succès, cette partie du vêtement reste associé aux Etats-Unis et au Royaume-Uni au petit garçon capable de voler.
Claudine ou Peter Pan, ce col habille les enfants dès le début du XXe siècle. A partir des années 50, il rejoint la garde-robe féminine, notamment grâce à l’actrice Audrey Hepburn. Le style du col correspond parfaitement à l’image de jeune femme sage et enfantine véhiculée par l’actrice et devient iconique. Tombé quelque peu en désuétude, il fait son grand retour depuis quelques années. Personne ne sait aujourd’hui si le metteur en scène du Peter Pan de Broadway avait lu les romans de Colette avant d’habiller son petit personnage d’un col… Claudine.
